#Culture Et Talents
Publié le 03/03/21
Lecture 6 Min.
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#Culture Et Talents

Installée depuis plus de vingt ans à Madrid, Sophie del Campo, Executive Managing Director Natixis Investment Managers Iberia, US Offshore & Latam, a su tirer le meilleur parti des différences culturelles. En 2020, Sophie a participé à la 1re édition de notre Women’s Sponsorship programme. À travers ce programme, les membres de notre comité de direction générale s’engagent à mentorer 15 femmes leaders et à les accompagner pendant un an dans leur développement de carrière.

 

 

Sophie Del Campo dans les locaux de Natixis à Madrid

 

Les voyages forment la jeunesse… et proposent aussi parfois des chemins imprévus. Quand, fraîchement diplômée de Sciences Po Paris (Master Finance), Sophie Bozo – qui a étudié comme langues étrangères l’anglais et l’allemand – rejoint Madrid à la fin de années 80 pour son stage de fin d’études à la Société Marseillaise de Crédit, elle n’imaginait pas qu’elle y rencontrerait son futur mari, Ignacio del Campo. Encore moins qu’elle entamerait dans la foulée toute une carrière dans la langue de Cervantès.

 

Les relations hommes-femmes sont beaucoup plus équilibrées en Espagne.

 

Après une parenthèse de huit ans en France à la Société Marseillaise de Crédit puis au sein du cabinet conseil Deloitte, Sophie del Campo est en effet installée depuis vingt ans à Madrid. L’Executive Managing Director de Natixis IM Iberia, US Offshore & Latam y a acquis une excellente connaissance du monde hispanique : « l’avantage de bien connaître deux cultures est que l’on peut prendre le meilleur de chacune ».

 

Se nourrir des différences culturelles

Pourtant, lors de ces premières années en Espagne, la jeune Parisienne est frappée par le machisme ambiant « bien plus marqué à l’époque qu’en France », note-t-elle. « Je me souviens d’une de mes premières réunions avec un client à la Société marseillaise de crédit. Après quelques minutes de discussions informelles, il demande à mon responsable si je peux sortir afin qu’ils parlent du fond de son dossier. Il ne lui était pas venu à l’esprit qu’une femme de 23 ans pouvait et en l’occurrence allait se charger de l’analyse financière de sa société », se remémore Sophie del Campo avec une pointe d’amusement. « Aujourd’hui c’est totalement différent. Les relations hommes-femmes sont beaucoup plus équilibrées en Espagne. La parité y est même parfois plus développée qu’en France. Ici, par exemple, le congé paternité de 12 semaines est obligatoire et il sera porté à 16 semaines en 2021. »

Au niveau professionnel, Sophie del Campo observe aussi des différences notables : « les Espagnols ont un sens de la hiérarchie bien plus fort que celui des Français, souvent plus critiques, mais qui recherchent davantage le consensus et la collégialité ». Aujourd’hui encore, elle est toujours étonnée de constater combien « les Espagnols cultivent un complexe d’infériorité qui n’est absolument pas justifié. Tout ce qui vient de l’étranger et notamment d’autres pays européens est beaucoup plus valorisé que le local (un peu l’inverse de ce qu’on peut observer côté français…). Or leur niveau de compétence et d’engagement au travail n’a rien à envier à celui de leurs homologues européens ».

 

 

Sophie Del Campo dans les locaux de Natixis à Madrid

 

Consacrer le temps nécessaire au relationnel

Elle est d’ailleurs manifestement plus à l’aise avec une équipe espagnole qu’italienne par exemple. De son expérience chez Pioneer Investments Spain, filiale à l’époque de la banque italienne Unicredit, elle a ainsi le souvenir d’un mode de management beaucoup plus basé sur le réseau et les connections personnelles que sur les compétences.

 

Le temps consacré au relationnel est un passage obligé si l’on veut vraiment parler affaires.

 

Autre qualité ibérique, selon Sophie del Campo : « la capacité à créer d’emblée une relation de proximité chaleureuse au sein des équipes mais aussi entre clients et fournisseurs ». Pour elle, cela n’a rien à voir avec la France ou l’Europe du nord : « Cette tendance est opportunément compensée par le sens de la hiérarchie qui évite toute dérive. » Seulement voilà, cette convivialité prend une tout autre tournure dès lors que l’on traverse l’Atlantique. Responsable des marchés latino-américains, Sophie del Campo a dû se plier à des habitudes locales parfois contraignantes : « au Mexique, un petit-déjeuner d’affaires ne dure pas moins de deux heures. Quant à un déjeuner, il faut compter au moins deux à trois heures. Or ce temps consacré au relationnel est un passage obligé si l’on veut vraiment parler affaires. Forcément, les processus sont plus longs. Il faut s’organiser en conséquence ».

 

Savoir cultiver la bienveillance

Attention toutefois, prévient Sophie, à ne pas considérer les différents marchés de la région Latam comme un grand tout. « Il y a autant de particularités culturelles que de pays », souligne Sophie del Campo, « si au Chili le mode de fonctionnement est très européen notamment dans le secteur financier, au Pérou par exemple le marché est encore très embryonnaire avec un certain archaïsme réglementaire et une très faible ouverture à l’international ».

 

Je m’emploie toujours à utiliser ce prisme culturel pour tirer le meilleur parti de chacun.

 

Mais cette férue de ski a manifestement su slalomer entre toutes ces particularités locales. De cette pluralité, elle a même fait un atout. « Je m’emploie toujours à utiliser ce prisme culturel pour tirer le meilleur parti de chacun. Mon équipe compte une petite dizaine de nationalités dont la moitié latino-américaine. Savoir cultiver la bienveillance entre chaque collaboratrice et collaborateur en tenant compte des différences culturelles est essentiel. En fait, c’est passionnant et très enrichissant de gérer cette interculturalité ».