Publié le 01/04/19
Publié le 01/04/19
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Troisième tentative, troisième échec : encore une fois, Theresa May n’a pas réussi à faire passer son plan à Westminster. Si une quatrième tentative est rejetée, quels sont les deux scénarios à prévoir ?

René Defossez, économiste UK et stratégiste Fixed Income vous livre son analyse à travers notre nouvelle chaîne de podcast à découvrir. 

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Troisième tentative, troisième échec : encore une fois, Theresa May n’a pas réussi à faire passer son plan à Westminster.

Mais elle a perdu avec un écart sensiblement plus faible qu’à l’occasion des deux premières tentatives, de seulement 58 voix, contre 230 et 149 les première et deuxième fois. C’est la raison pour laquelle elle a, apparemment, l’intention de proposer son plan une quatrième fois. Le vote pourrait avoir lieu dès demain selon certaines rumeurs. Mais ça suppose que le speaker de la Chambre soit d’accord, ce qui n’est pas acquis. En effet, John Bercow a bien rappelé qu’il n’accepterait pas qu’un texte déjà présenté soit de nouveau soumis aux députés sans qu’il ait fait l’objet de modifications substantielles.

Mathématiquement, il est vraiment très difficile de dire si Theresa May peut encore gagner : on ne voit pas très bien ce qu’elle pourrait ajouter comme arguments pour convaincre notamment le DUP et certains membres de l’ERG de voter en faveur de son plan.

Elle a déjà à peu près tout fait : d’un côté, elle a proposé sa démission en cas de succès, elle a brandi la menace d’un soft Brexit, ou de pas de Brexit du tout. De l’autre, elle a brandi la menace d’un hard Brexit, d’une rupture désordonnée. Rappelons que ce qui coince principalement dans ce withdrawal agreement, c’est le backstop sur l’Irlande qui pourrait contraindre le Royaume Uni à rester indéfiniment dans l’Union douanière, et donc lui interdire de conclure des accords commerciaux avec d’autres pays.

De leur côté, dès aujourd’hui, les députés britanniques vont de nouveau essayer de proposer un plan alternatif à celui de Theresa May.

Jeudi dernier, ils avaient échoué, même si parfois c’était de peu. En particulier, la motion d’une union douanière qui était proposée n’a perdu que de huit voix. Est-ce qu’ils vont réussir cette fois-ci ? C’est là encore difficile à dire. Mais le résultat de la première tentative ne permet pas d’être très optimiste.

Il y aurait bien une troisième voie, qui serait de construire une coalition entre les différents partis de Westminster, autour d’un projet de type union douanière. Mais une telle initiative de la part de Theresa May conduirait presque inévitablement à une explosion du parti conservateur, alors qu’il est déjà en danger.

A quoi faut-il s’attendre maintenant ? C’est évidemment impossible de répondre à cette question, et on ne peut faire qu’une succession d’hypothèses.

D’abord, si finalement le plan de Theresa May passe, le Royaume Uni sortira de l’Union européenne le 22 mai, soit un jour avant les élections européennes, et entrera dans une période de transition qui durera jusqu’en décembre 2020, mais qui pourra être prolongée.

S’il est une quatrième fois et peut-être définitivement rejetée, plusieurs possibilités sont à envisager :

1re possibilité : les députés se mettent d’accord sur un plan B. Ils peuvent imposer à Theresa May, via une motion, de le négocier avec Bruxelles.

2e possibilité : les députés ne se mettent pas d’accord sur un plan B, et dans ce cas soit on va vers un no-deal Brexit, soit on va vers un no-Brexit, soit encore vers une extension longue de l’article 50. Et là à nouveau, on a plein de possibilités : on peut avoir des élections générales, un second référendum, peut-être même de nouveaux votes sur le plan de Theresa May, ou une révocation de l’article 50. Et s’il y a une extension longue, le Royaume Uni pourrait bien être obligé de participer aux élections européennes, ce qui ne sera pas de nature à plaire aux Brexiters, et qui peut même s’avérer assez cocasse, si l’extension ne dépasse pas la fin de l’année, puisque les députés européens britanniques ne siègeraient que pour quelques mois, mais pourraient participer à des votes importants.

Bref, à moins de deux semaines de la première date possible pour le Brexit, le chaos politique reste total. Cette situation est évidemment angoissante pour les entreprises, qui n’ont toujours aucune idée de la nature des relations futures entre le Royaume Uni et l’Union européenne, et a déjà coûté très cher à l’économie britannique.