Tribune de Luc Barnaud, chief digital and technology officer de Natixis, sur l’acculturation digitale et l’open innovation
Le sentiment d’urgence, une perception encore diffuse
Tout naturellement, le digital fait déjà partie de notre quotidien : son adoption est effective dans nos actes de tous les jours. Plus personne n’est étonné d’utiliser des applications mobiles pour effectuer des payements instantanés ou de discuter avec des bots pour obtenir des informations… Si la conversion au digital est effective dans le cadre de la vie personnelle, est-ce toujours le cas dans le milieu professionnel ?
Bien souvent, les collaborateurs ne le perçoivent pas encore assez et semblent pris de court lorsqu’il s’agit d’appliquer cette transition également dans leur travail quotidien. Et pourtant les opportunités sont là en utilisant mieux la data, en s’appuyant sur des innovations technologiques comme la blockchain par exemple. La formation tout au long de sa vie devient cruciale surtout si l’on considère que 85 % des métiers en 2030 n’existent pas encore. Dans ce cadre, la compréhension de ces bouleversements technologiques est devenue une priorité non plus seulement au niveau de l’entreprise mais au niveau de chaque collaborateur, quelle que soit son activité.
La transformation va bien au-delà des outils digitaux mis à disposition, elle intègre pleinement aujourd’hui les façons de travailler et de percevoir les métiers en constante évolution. Si l’adoption reste bien sûr un défi à relever pour tous, la compréhension des outils ou des nouveaux processus est au cœur des interrogations.
L’enjeu digital : une adoption propre à chacun
Toute technologie, aussi perfectionnée et utile soit-elle, suppose qu’elle ait un sens réel pour les équipes. C’est un processus qui demande du temps et une démarche active d’évangélisation. Cette acculturation ne se fait pas en un jour. Tout naturellement, cela demande un développement des savoirs et des compétences. Mais également un savoir être dans la prise de conscience et dans les nouveaux comportements à adopter.
L’acculturation ne doit pas s’effectuer en vase clos : elle n’obtiendra pas suffisamment de résonance si elle est uniquement menée en interne. La confrontation à des expériences et des échanges avec le monde des Ecoles, avec des pairs ou d’autres industries est primordiale pour ouvrir sa réflexion et apporter des éléments de réponses aux attentes des collaborateurs. C’est un travail en écosystème qu’il faut amorcer, les réactions externes étant une source d’insights forts pour appréhender l’innovation.
Nous ne devrions donc pas parler d’adoption du digital en général mais plutôt au pluriel : chaque salarié a une vision précise, une façon d’aborder le changement qui lui est propre. Cela dit, la disposition la plus appropriée à avoir est certainement celle de l’ouverture d’esprit et de la patience. La curiosité est aussi une qualité majeure, un moteur efficace au quotidien pour que chacun puisse s’enrichir de lectures, de MOOC, de participations à des événements organisés par l’entreprise ou d’autres institutions, et ainsi développer ses compétences dans le Digital. Les outils mis à disposition par l’entreprise comme par exemple les programmes de développement des compétences du futur (upskilling) permettent d’accompagner les collaborateurs dans l’évolution de leur carrière. Au-delà, il appartient à chacun d’entre nous de rester à l’écoute des transformations et de prendre des initiatives personnelles en fonction de nos intérêts professionnels. En résumé, c’est avant tout, une question de prise de conscience et de confiance entre chaque maillon et chaque acteur, car, si nous ne pouvons pas tout le temps anticiper les technologies à venir et les impacts qu’elles auront sur nos activités, nous pouvons apprendre à nous adapter et à réagir en conséquence.
J’ai, à ce sujet, une anecdote : j’ai surpris il y a quelques jours une conversation impromptue entre des collaborateurs d’une équipe RH. Ils discutaient vivement et se demandaient dans quelle mesure il serait possible d’intégrer plus de data science dans leur activité. Cette conversation m’a montré à quel point les métiers et les équipes peuvent se sentir concernés par le digital et s’approprier eux-mêmes les sujets. Il faudrait que le digital et la data puissent encore davantage faire l’objet de nos conversations quotidiennes et être la source de nouveaux challenges à relever.
À mes yeux, un écueil serait de fonctionner à deux vitesses avec une équipe dédiée au Digital et le reste des collaborateurs qui ne sentent pas autant impliqués. Le Digital doit être au cœur du fonctionnement de l’entreprise pour qu’il puisse irriguer l’ensemble des équipes. Tant que cela reste dans un cercle d’initiés, cela ne pourra pas fonctionner. L’enjeu de transformation se situe vraiment à ce niveau-là : mobiliser l’ensemble des énergies. Si l’entreprise a une ambition d’inclusion, les collaborateurs sont aussi responsables de leur propre apprentissage du digital, que ce soit via leur entreprise ou via d’autres sources.
Si nous devions finalement définir ce qu’est l’acculturation digitale, ce serait sans doute l’apprentissage progressif des technologies, selon un schéma de test and learn. Acceptons donc d’être parfois hésitants dans nos premiers pas avant d’engager pleinement la course au digital !
Je vous invite à découvrir ici la journée d’acculturation digitale « Digital Camp » qui a eu lieu chez Natixis.